25 octobre 2010




IF, Une certaine forme d'éthique.

à méditer: Un texte d'Antoine Guignier.




ISO 26000 : Ethique, individu et résistance

La rédaction de Planet Facilty me propose de réagir à l’approbation de la Norme ISO 26000 de responsabilité sociale.

Cette norme gère notamment : la gouvernance, les droits de l’Homme, les relations et conditions de travail, l’environnement, la loyauté des pratiques des affaires (Fournisseurs), les questions relatives aux consommateurs et la contribution au développement local.

Bien sur, ce sont des principes intéressants et dont la mise en œuvre est attendue par le public, les usages, les clients.

C’est la recherche d’une certaine forme d’éthique dans les pratiques professionnelles et l’environnement de travail.

Cependant, la norme n’est rien si l’homme qui l’applique n’est pas bon ou au moins à volonté de l’être.

A l’heure des suicides de France Telecom et de l’existence d’entreprises qui construisent de façon volontaire des organisations du travail pathogènes, il est nécessaire de se poser la question de l’efficacité de ce type de Norme.

Il aurait été tout à fait possible que FT soit certifiée ISO 26000 et poursuivent les pratiques pour lesquelles elle a été condamnée. Heureusement, cela n’a pas été le cas.

La RSE, les indicateurs, la recherche de tiers permettant de garantir les pratiques…est ce réel ?
Est-ce viable ? Les agences de notation financière ont assuré la validité des produits financiers « subprime », alors que leur conception s’est avérée malhonnête. Et pourtant, ils l’ont fait.

La réponse éthique à des formes possibles (mais pas nécessaires) d’oppressions ou de malversions dans les entreprises peut-elle passer par l’application d’une norme, des bonnes pratiques ? Est-ce que le manuel de l’honnêteté existe, est ce que les audits de probité suffisent ?

Malheureusement non. A la fin, il y a toujours un homme, une main, une pensée, qui elle est responsable de ses actes, et qui doit arbitrer entre une pression économique et des aspirations éthiques.

« Je suis cadre. J’ai des enfants et un patron qui me pousse à plus de résultats, plus de rentabilité. Puis-je encore arbitrer le dilemme éthique. Ai-je un ou deux cerveaux. Que faire ?»

Trop souvent le cadre dirigeant d’un certain âge a renoncé à affronter le dilemme, le doute. Il applique une consigne, il cherche des sources de profits et les limites éthiques tombent les unes après les autres (voir France Telecom). Le piège étant que l’organisation laisse penser que les choses sont normales, que l’on est protégé, qu’un acquiescement tacite existe. Ceci est très dangereux car la loi, elle, perdure dans l’organisation. Elle ne s’arrête à la porte de l’entreprise et l’individu pris dans le flot, se retrouve condamné.

La réponse éthique n’est qu’individuelle. L’éthique part de l’individu et retourne à l’individu. La norme n’est qu’un véhicule, un sac vide qu’il faut remplir. L’organisation ne peut créer par elle-même qu’un objet abstrait, sans « âme », mais qui peut avoir sa dynamique, son développement, ses effets, ses sources. L’éthique de l’organisation doit passer sans cesse l’épreuve de sa cohérence, de sa réalité effective et non déclarative. Comme toujours, il faut que la norme soit au service des individus et non l’inverse.

Il s’agit donc de proposer une forme de résistance, pas une opposition, une simple résistance, légère mais profonde où plus on pousse, plus cela devient dur, jusqu’à ce que la dureté devienne inébranlable.

Ceci est complexe pour l’organisation qui a besoin d’obéissance, de fluidité dans la décision, dans le partage des objectifs. La résistance est ennemie. Résistance au changement, à la mobilité, flexibilité.

Et pourtant, c’est la résistance qui évite le pire, qui arrête le geste de trop.

Ce constat rend la pratique réelle de l’éthique compliquée, mais je suis optimiste. Je pense que les organisations en sont capables. La réflexion et la prise de conscience sont en cours.

En conclusion, après avoir lu la Norme ISO 26000, je vous propose de relire ce texte de Rudyard Kipling, qui me semble être une clé toujours vivante pour tout individu qui se déclare « éthique» :

« …Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère
Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur ;
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n'être qu'un penseur ;

Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d'un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,

Alors, les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils «

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